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CINQUIÈME PARTIE

 

L’HELLÉNISME

 

Introduction

 

 

            On entend par hellénisme un phénomène culturel qui a été la suite d’un événement politique : Alexandre el Grand réussit à bâtir en très peu de temps un grand empire et, pour rendre plus homogènes les peuples conquis, se proposa de faire parvenir la culture grecque à tous ses domaines. Sa mort, survenue trop tôt, en 323, lui empêcha de mener à bien son plan ; mais ses généraux, qui se sont partagé l’empire après d’âpres combats, réussirent à la faire, au moins partiellement. C’est ainsi que sont nées de nombreuses villes qui furent de nouveaux foyers de rayonnement politique, économique et culturel ; par exemple Pergame, Éphèse, Antioche, Rhodes et surtout Alexandrie, qui mérite une considération à part. Athènes perdit son autonomie mais en revanche le grec devint la langue universelle, bien qu’appauvri par le contact avec d’autres langues. Ce grec vulgaire ou koinè (« langue commune » en grec) devient le véhicule de la culture et du savoir.

 

            À partir de l’an 197 avant le Christ la présence de Rome dans l’ancien empire d’Alexandre se fait sentir, pour devenir absolue avec la prise d’Alexandrie par les armées romaines en 47 avant le Christ. Le monde culturel hellénique est assimilé par Rome et se répand et prolonge son influence avec celle de l’Empire romain, jusqu’à la décadence de celui-ci au Vème siècle de notre ère.

 

            On divise habituellement cette longue période en deux parties : la première, l’hellénisme, va jusqu’à la deuxième moitié du premier siècle avant le Christ, marquée par la naissance de l’Empire romain ; la deuxième comprend toute la vie de l’Empire et coïncide avec la fin de l’époque païenne et le commencement du christianisme. Les pages qui suivent seront consacrées à la première de ces périodes, et on réservera la deuxième pour une sixième partie : « la philosophie à l’âge impérial ». Cependant, pour donner une plus grande unité thématique à l’exposé sur l’hellénisme, nous ferons mention dans les pages qui lui sont consacrées à des auteurs de l’époque impériale qui continuent dans la ligne des écoles qui sont nées avant l’Empire ; ce sera le cas de Sextus Empiricus par exemple.

 

            Du point de vue des connaissances, l’étude de l’hellénisme nous met en contact avec les fondements culturels de la période suivante, qui voit la naissance et la première propagation du christianisme, qui apporte une nouvelle vision du monde très vigoureuse, qui finira par imprégner la société.

 

            A partir d’Alexandre el Grand le Grec devient cosmopolite, citoyen du monde ; il en va de même pour les habitants des pays conquis. Le pouvoir devient plus fort et, en même temps, plus éloigné des individus ; d’où un désintérêt progressif pour la res publica car il ne s’agit plus du « gouvernement de la cité ». L’idéal de l’homme sage est toujours en vigueur. Chaque ville importante accueille sans réserve tout celui qui peut lui apprendre quelque chose, et des bibliothèques magnifiques font leur apparition, dont celle, célèbre, d’Alexandrie, incendiée plus tard par le général arabe Omar, vers l’an 600 de notre ère. Il y a donc une grande symbiose culturelle, mais les maîtres sont issus des écoles traditionnelles : l’Académie, qui à cause de plusieurs motifs avait créé des foyers de disciples à des endroits divers, le Lycée des Péripatéticiens, les écoles de Mégare, de Cyrène, etc.

 

            D’autre part, la philosophie prend une orientation différente : on ne cherche plus le savoir pour l’amour de la sagesse, mais comme un moyen pour vivre et être heureux : la philosophie se réduit en conséquence à l’éthique, une éthique dans laquelle les principes de Socrate, transmis par ses disciples mineurs, demeurent en vigueur dans une certaine mesure. L’éthique est accompagnée d’une physique qui remplace la métaphysique de Platon et d’Aristote et qui revient à la spéculation présocratique. Le rejet de la métaphysique n’est que la conséquence nécessaire de la négation explicite de la réalité suprasensible et l’acceptation du matérialisme qui en découle. L’étude de l’éthique suscite de l’intérêt pour une logique permettant d’expliquer les règles morales. Cependant, tout comme chez les penseurs présocratiques, les concepts moraux jouissent d’une certaine autonomie, car ils découlent plus des intuitions des fondateurs des différentes écoles que d’un développement cohérent de postulats physiques ou logiques, avec lesquels ils entrent d’ailleurs souvent en collision.

 

            À cette époque la philosophie gagne en extension, justement à cause de sa fonction éminemment pratique, car elle devient l’instrument auquel les hommes devront faire recours pour résoudre leurs problèmes existentiels, faute de pouvoir s’appuyer sur des valeurs traditionnelles périmées. Comme contrepartie, la spéculation perd en profondeur ; la conséquence la plus significative en est le rejet de la philosophie de Platon et d’Aristote.

 

            Les trois grands courants doctrinaux de l’hellénisme – l’épicuréisme, le stoïcisme et le scepticisme – héritent d’une partie des enseignements des écoles socratiques mineures et peuvent être considérés jusqu’à un certain point, comme leur prolongement.

 

            L’école cynique, fondée par Antisthène, a Diogène de Sinope (413 à 327 avant le Christ, contemporain de Platon) comme représentant le plus caractéristique. Son opposition au plaisir, aux richesses et au pouvoir sera l’un des points forts des doctrines hellénistes. Mais son radicalisme exagéré et son manque de valeurs positives font que le cynisme ne survit pas au-delà du premier siècle avant le Christ.

 

            Les disciples d’Aristippe, fondateur de l’école cyrénaïque, se sont divisés en trois courants différents qui développèrent chacune à sa manière l’hédonisme de leur maître, au point d’introduire de profondes modifications qui provoquèrent l’extinction de l’école. Cependant, l’hédonisme primitif de celle-ci fut continué par Épicure.

 

            L’école de Mégare développa surtout la dialectique, comprise dans un sens plus éléate que socratique. Dans une certaine mesure c’est cette dialectique qui a été récupérée plus tard par les sceptiques.

 

            Le panorama intellectuel qui précède et accompagne l’hellénisme doit être complété en tenant compte du sort qui a été celui de l’Académie et celui du Lycée.

 

            Les disciples et successeurs de Platon à la tête de l’Académie – Speusippe (-407 à -339) ; Eudoxe (-406 à -355) ; Xénocrate (-396 à -314) et Héraclide Pontique (-388 à -310) – continuèrent la réflexion sur le noyau central de la pensée de leur maître, la réalité suprasensible, en en introduisant des changements non négligeables qui finirent par dénaturer complètement la doctrine originale et amenant l’Académie vers le scepticisme.

 

            Le sort du Lycée ne fut pas plus heureux. Aucun des disciples d’Aristote ne réussit à maintenir le niveau spéculatif du maître. Ses successeurs – Théophraste (-372 à -288) ; Eudème de Rhodes ; Dicéarque ; Aristoxène, etc. – ont orienté l’école dans une direction naturaliste qui, avec Straton de Lampsaque (-330 à -270), troisième scolarque du Lycée, acquiert déjà une coloration matérialiste. L’événement les plus relevant de l’histoire du Lycée a été sans doute la redécouverte des écrits ésotériques d’Aristote et leur publication par Andronic de Rhodes au premier siècle avant le Christ.

 

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